“C’est assez paradoxal, alors que la Wallonie n’a jamais fait autant pour le logement, le secteur de l’immobilier nous interpelle et nous demande de l’aider parce que la crise est sans précédent. Je peux le comprendre, mais nous avons déjà agi”, explique le ministre wallon du Logement, Christophe Collignon (PS). Bien conscient “qu’il faudra, à l’avenir, réfléchir à la manière dont on conçoit l’habitat”, le ministre veut tenter d’apporter des réponses au secteur immobilier. Pas certain que ça plaise. Récemment, plusieurs acteurs (construction, agents immobiliers, fédération du notariat, Union wallonne des architectes, etc.) ont remis un mémorandum au gouvernement wallon. Ils préconisent une nouvelle vision de la politique du Logement en Wallonie, garantissant à tous les citoyens l’accessibilité au logement et soutenant la transition énergétique. “Ils évoquent le fait qu’en quatre ans, les Wallons ont perdu 50 % de leur pouvoir d’achat immobilier, la construction et la rénovation d’un bien étant notamment devenues 25 % plus chères ces deux dernières années. Ils disent que les Wallons ont de plus en plus de mal à devenir propriétaires”, argumente encore le ministre.

S’il partage les constats, Christophe Collignon précise que “cette situation ne touche pas seulement la Wallonie. Toute l’Europe est sous tension sur cette question”. Les causes sont notamment “la crise énergétique, la remontée des taux d’intérêt et le prix des matériaux qui augmente”. Il constate que “comme les banques ne prêtent plus la totalité de la somme nécessaire pour acheter une habitation, pour les jeunes, c’est compliqué”. Et le Hutois d’ajouter que le secteur aussi va devoir revoir certaines choses : “Ils ont vécu pendant des années avec des marges qui sont impossibles désormais. Ils vont devoir apprendre à faire avec des marges moins importantes.” Il répond également qu’une des solutions passera par l’Europe qui “doit en faire une priorité parce que le logement est un besoin primaire : l’Europe doit donner les moyens pour faire de la transition écologique dans ce secteur, une priorité”.

Christophe Collignon déclare néanmoins qu’en Wallonie “on ne découvre pas le problème et on ne peut pas dire qu’on n’a rien fait”. Il insiste sur le fait que le premier projet qu’il a mené a été de donner accès aux prêts sociaux à un plus grand nombre de personnes qu’avant. “Il faut se rendre compte que dans une zone à haute pression foncière, la valeur du bien que l’on peut acheter avec ce type de prêt va jusqu’à 405 000 euros. La collectivité sait difficilement faire mieux.” Aujourd’hui, la Wallonie a donc 700 millions d’euros d’engagements sur ces prêts, dit-il. “Nous avons doublé le volume par rapport au passé.”

Alors que, dans son mémorandum, le secteur immobilier demande des mesures fiscales innovantes, Collignon rétorque que le gouvernement a déjà agi dans ce sens. “Le ministre du Budget a fait passer l’abattement fiscal sur les droits d’enregistrement de 20 000 à 40 000 euros. Donc sur l’acquisitif, on ne peut pas dire qu’on n’a rien fait !” Revoir la logique du chèque habitat ?

Il déclare encore que de nombreux moyens ont été mis sur la table pour assurer la transition écologique, dans le logement public, mais aussi dans le logement privé avec le régime de primes : “Les montants sont conséquents.” Il rappelle que, comme le demande le mémorandum, il a lancé des programmes d’achats de logements en PPP (partenariat public-privé).

Pour l’avenir, il conclut que, de son point de vue, “chacun va devoir comprendre qu’il faudra désormais construire de l’habitat petit et plus en hauteur”. Il préconise enfin de revoir la manière dont on travaille avec le chèque habitat (déduction fiscale sur la durée de l’amortissement). “Ce mécanisme n’existe plus dans les autres régions : ne devrait-on pas utiliser les 800 millions du chèque habitat pour financer l’aide à l’achat et plus l’amortissement ?”